Altitona, Bosquet Druidique

Les rites de passage

Altitona

Dans le cours d’une existence , tout être , toute chose subit des transformations en franchissant des étapes identifiés comme des moments particuliers, des moments clefs, des « seuils » par les quels il faut passer.

Changement de forme, changement de paradigme, changement de nom..

Ces moments clefs qui sont à l’origine des rites de passages dont on trouve trace dans la majorité des cultures sont aussi des moments de tension pour l’individu ou la société

Dans une vie humaine il y a plusieurs moments clefs, la naissance et la mort , la reconnaissance par une communauté, l’accès à l’âge adulte l’accès à l’âge de Sagesse sans compter les rites liés à un parcours spirituel et que l’on dira initiatiques.

Et qui peut être seront la préfiguration d’un état « après la mort » c'est-à-dire dans un Autre Monde en résonance avec celui-ci .

Il y a plusieurs aspects à entrevoir dans les rites de passage

  • Ils accompagnent et donnent du sens à une évolution/transformation individuelle. En cela ils permettent aux individus de s’identifier à un nouvel état, une nouvelle vision d’eux même.

  • Ils inscrivent le passage dans un contexte social. Ainsi l’enfant est reconnu par ses parents, par sa famille, par une « tribu ». Lorsqu’il devient adulte, il investit un nouveau rôle social et est reconnu comme responsable . Lorsqu’il devient âgé , il a la possibilité de se détacher du « combat quotidien » pour se consacrer à la transmission de l’expérience et de la sagesse acquises tout au long de sa vie. Ce coté social n’est pas à négliger même si dans l’occident actuel les rites de passage ne sont plus régis par la société mais par les individus eux-mêmes ou au mieux par de petites groupes qui tentent de préserver les formes traditionnelles .

  • Et enfin, les rites de passage véhiculent sans aucun doute une vision du monde, qui justement remet de l’ordre dans le chaos apparent des transformations et replacent les individus dans une perspective à la fois sacrée, sociale et individuelle. Lorsque les choses ont du sens, si l’on sait où on va, les transformations ne sont plus subies comme étant la perte d’un état d’équilibre antérieur mais comme un nouveau pas dans la grande marche de l’évolution .



Dans notre lecture de la spiritualité Druidique, le premier rite de passage concerne le nouveau né ou le petit enfant. Il s’agit d’un rite de reconnaissance, à la fois par les parents, leur entourage et une présentation aux Dieux. Ce rite concerne l’enfant bien entendu mais aussi et surtout les parents qui doivent investir leur nouveau rôle , leur nouveau statut avec toutes les inquiétudes qui peuvent y être liées



Le second rite de passage se fait au moment de transition de l’enfance à l’âge adulte qui fait suite à la puberté et qui transforme l’adolescent en un adulte potentiellement responsable et intégré .

Dans l’antiquité celtique la pratique du forestage ( éducation de l’adolescent par l’oncle maternel) correspond à cette période spécifique passage entre l’enfance et l’âge adulte.

Cela constituait une période d’initiation , y compris aux pratiques guerrières et vis-à-vis de laquelle nous n’avons guère d’équivalent à l’heure actuelle.

Ainsi donc, à la période bouillonnante de l’adolescence et à son désordre potentiel succède une prise de conscience des responsabilités de l’individu qui devient « auto-nome » . Passant du statut « d’enfant de » au statut potentiel de « parent de »

On pourrait également dire que se joue là le passage du principe de plaisir au principe de réalité.

L’adolescent perd son statut d’enfant et devient adulte, responsable au sein d’une communauté. Il est en capacité de se marier , et d’engendrer à son tour. Tout ceci reste le plus souvent une potentialité parce qu’aujourd’hui l’âge d’être parent est plus tardif que par le passé. Mais la potentialité est une expression différée d’un « pouvoir » existant . Elle n’est pas absence .

Dans les rites de passages druidiques, l’adolescent est d’abord séparé de ses parents, des symboles de son enfance. Selon qu’il s’agisse d’un garçon ou d’une fille les rites sont menés par la communauté des hommes ou celle des femmes . Il s’y exprime le deuil de l’enfance, il y est donné des clefs pour le passage à l’état adulte qui s’accompagnent d’un parcours émaillé d’épreuves symboliques.

L’adolescent, revient ensuite vers la communauté, vers ses parents qui le reconnaissent dans sa nouvelle identité .

Ce rite de passage concerne tout autant l’adolescent que son entourage et en premier lieu parental. L’accès à la majorité légale permet également au jeune adulte de suivre le parcours druidique et d’y bénéficier de ses initiations.

Initiations qui constituent d’autres rites de passage. D’un état à un autre, d’une fonction à une autre . Très généralement le futur initié meurt à un état pour accéder à un état dit « supérieur » et probablement est il supérieur au moins en potentialité.

Lors des initiations de fonction, le « programme « de la fonction lié au mythe, le contenu ou du moins ce qui constitue le cadre manifeste de la fonction et les pouvoirs/prérogatives liés à cette fonction sont transmis aux impétrants de façon ritualisée . Mais le rite initiatique ne vaut pas seulement pour son contenu, ce qu’il transmet de façon formelle mais il vaut aussi par les émotions qu’il mobilise. Un rite initiatique doit émouvoir, ( aime- mouvoir ) mobiliser l’âme et engendrer l’étincelle qui transformée en feu opérera la « cuisson alchimique de l’individu..

Nous comparons d’ailleurs souvent le processus initiatique à un chaudron qui cuit, et transforme son contenu .

Ainsi l’initiation a différentes portées. Celle qui concerne le contenu manifeste , celle qui porte en elle un potentiel de croissance . Et puis la transmission du souffle ou de l’influence spirituelle.

Les initiations druidiques sont donc des rites de passages qui s’inscrivent dans un contexte spirituel , mais aussi agrègent l’individu dans le collectif de ses semblables ( en fonction ) .

Soit elles marquent une progression, et constituent une reconnaissance, soit elles désignent un ordre, un seuil que l’initié doit franchir pour trouver matière et chemin à sa transformation intérieure.



Le troisième rite de passage célébré par les Druides est celui de l’union druidique ou liage des mains, ( nous évitons le mot mariage) . Ce rite s’adresse au couple qui souhaite donner une dimension spirituelle à son union. Cette union druidique nous est assez fréquemment demandée , y compris d’ailleurs par des couples non druidisants.
La plupart du temps, les personnes non druidisantes, viennent à nous avec l’envie de marquer ce passage, cette union, dans ce qui reste encore le symbole du juste et du vrai , c'est-à-dire la Nature. La dimension païenne, le coté naturel, compréhensible, accessible des rites d’union sont un élément supplémentaire qui font que ces unions druidiques nous sont très régulièrement demandées.

Le plus souvent ce rituel est célébré devant amis, famille, témoins, dont la plupart n’ont jamais eu de contact avec le druidisme et il faut dire ( avec le recul qui est nôtre) que dans la grande majorité des cas, l’expérience est positive, pour nous et pour eux.

D’une manière générale le rituel d’union, consacre le désir de deux personnes. Dans notre façon de faire, nous rencontrons le couple avant le rituel et cherchons à définir avec lui , ce qu’il souhaite exprimer, pour lui-même ou vis-à-vis de son entourage.

Chaque rituel est donc spécifique tout en restant ancré sur un squelette commun .

Dans le rituel d’union, les parents et témoins peuvent être mis à contribution.

Pour les premiers, les parents, il s’agit de travailler sur la séparation/transmission , pour les seconds, nous sommes bien dans l’inscription sociale du rite. L’union , est issue d’une histoire, d’un contexte, de rencontres et les témoins sont en quelque sorte les garants d’histoire, les diseurs d’anecdotes.

L’ensemble de ceux qui assistent à ce rituel d’union, donne la caution du groupe à cet acte symbolique.

 

 Un autre rite de passage est celui qui concerne l’accès à l’âge de Sagesse. Façon pudique de dire qu’il concerne les personnes qui ont dépassé la maturité.

Ce qui se dit ici c’est qu’il y a un âge où les passions se sont transformées en expérience, que le désir immédiat est tempéré par la vision lointaine . Et puis souvent aussi , ce qui devait être accompli, le métier, l’œuvre matérielle ont été faits.

L’être peut alors se tourner vers les fins à la fois fin de cycle et finalité.

Avec l’âge le corps a perdu sa vigueur , sa plasticité, nous avons pris du recul peut être avec l’aspect mondain de l’existence. Ce qui pouvait être démontré l’a été et il n’y a plus rien à prouver. Il n’y a plus qu’à être. Tout ceci , la prise de hauteur ou de profondeur, concourt à l’émergence d’une sorte de Sagesse, fille de compréhension et d’expérience.

Les rites de passages liés à cette période , mettent l’accent sur le recul, la sagesse, une forme de détachement qui est celui de nos illusions. Il porte l’individu à s’appuyer sur son expérience, son désir de transmettre dans ce qu’ils ont de plus uniques et riches.



Le dernier rite de passage est celui de la mort et des funérailles. Ce rite concerne l’individu en fin de vie, les funérailles qui suivent son passage de l’autre coté » et les rites liés à la mémoire et au deuil . Ces derniers étant pratiqués au sein de la communauté des vivants.

Le Druidisme considère que Vie et Mort sont intimement liés et considère les passage de l’une à l’autre comme une transformation, un changement d’état mais en aucun cas une fin définitive.

Ainsi l’individu en fin de vie sera accompagné , de façon à ce que le passage se fasse de façon sereine . On le préparera au voyage, et pour qu’il parte en paix on recueillera sa volonté sur ce qu’il laisse et sur ce qu’il souhaite.

Le rituel des funérailles est sobre. On offre au défunt les hommages qui lui sont dû et ont lui remet un « viatique » pour son voyage vers les « Terres de l’Ouest. « , terme poétique qui évoque Avallon ou l’Autre Monde. C’est aussi pour ceux qui l’accompagnent le moment où le deuil doit débuter pour s’accomplir dans de bonnes conditions par la suite

Par la suite, des rituels de mémoire , des rituels aux ancêtres sont pratiqués, soit de façon individuelle soit de manière plus générale lors de moments clefs dans l’année

Le passage lié à la mort se décline également selon le schéma retrait ( funérailles), mise à l’écart ( deuil ) et réintégration sous forme de culte aux ancêtres.

Culte aux ancêtres qui peut prendre un caractère cyclique et saisonnier.

Car il nous faut aussi évoquer les rites de passages saisonniers, reflets macrocosmiques des rites de passages sociaux et individuels

Ce qui est en haut est comme ce qui est en bas. Et ce qui se joue, se lie, se transforme dans l’individu résonne avec les grandes phases de notre « Roue de l’année »

L’enfance est le printemps, l’adulte est dans l’été, la Sagesse vient avec l’automne et la récolte des fruits du travail, et la neige de l’hiver est comme le blanc linceul de la terre.

Chaque période porte sa signature , ses résonances avec l’environnement mais aussi avec les tendances individuelles.

Nous voyons donc que les rites de passages se déclinent à différents niveaux , au plus large dans la vision que nous avons des rythmes cosmiques, naturels. De façon plus restrictive ils concernent le groupe, la tribu, le « social » qui à la fois participe et contraint les passage individuels.

Le niveau le plus intime concerne les individus, ce qui se déroule en eux, les transformations qui s’opèrent en eux avec le temps comme complice.

Tout se transforme, tout bouge, tout se meut, rien ne demeure dans sa forme. L’évolution ne sa fait que rarement par à-coups, elle se déroule de façon progressive mais nous identifions des moments clefs dans ce mouvement continu . Et ce sont ces moments clefs, ces portes qui permettent d’identifier les passages et leurs rites.

Dans une approche traditionnelle, le contexte social est plus important que dans le monde moderne occidental. Les passages s’accompagnent de marques de statut, de prescriptions ou interdits, voir de modes de comportements particuliers. Ce n’est généralement plus le cas aujourd’hui mais il serait sans doute intéressant de réfléchir à la fonction de tout ceci .

Il ne faut pas non plus négliger le coté psychothérapique des rites de passages. Ils peuvent contribuer par leur nature et leur portée symbolique à résoudre les conflits liés à certains périodes de la vie et les tensions qu’elles génèrent entre l’individu et son environnement

Les rites de passages , si tant est qu’ils soient compris et adaptés sont sans doute un des moyens qu’ont les individus de se réapproprier leur vie et de l’inscrire dans la triple enceinte du soi, de l’autre et du Monde.

Les rites de passages, liés à la naissance, à l’adolescence, au mariage, à la mort ..inscrivent l’individu dans une ligne intergénérationnelle et contribuent à son ancrage dans un contour traditionnel qui s’il était absent laisserait l’individu seul face à ses incertitudes et ses projections.

Ces rites de passages traduisent une volonté d’inscription choisie dans une collectivité porteuse de sens.

Les rites de passage sont communs à la plupart des traditions, et la plupart des traditions reconnaît les mêmes grands moments clefs dans une vie d’humain.

Ce qui fait la spécificité du druidisme , outre la référence à un modèle dynamique saisonnier, c’est le mythe et l’intuition d’une pensée celtique ancienne.

Dans la mise en œuvre des rites de passage nous tentons de nous ancrer dans le mythe et la « mémoire » mais nous cherchons aussi l’inspiration de l’instant présent.

Le rituel fait que l’impact individuel du passage est remis dans une perspective globale et sacrée ce qui donne sens et équilibre. En revanche, l’émotion n’est jamais absente , elle contribue à donner l’énergie et le mouvement aux rites.

Il n’y a pas si longtemps, et récemment encore dans les campagnes, les rites de passages étaient nombreux, codifiés et intégrés dans le collectif .

La perte de sens qui résulte de l’abandon actuel de ces rites aboutit à une perte de repère et l’individu se trouve seul confronté aux changements qui s’opèrent en lui et autour de lui.

D’où l’importance de nos voies païennes qui peuvent renouer avec le sens, avec leur intuition des cycles, ceux de la nature et ceux validés par la tradition.

Et même s’il peut sembler à certains que les rites de passage « sociaux » sont trop exotériques, trop « utilitaires ». Même s’ils sont parfois négligés au profit de rites dit « initiatiques » il n’en demeurent pas moins une voie d’harmonisation et d’équilibre.

Importants !